- Les plans au 1/15 fournis par l'association
permettent de bien cerner le travail mais les emplacements des 7 boulons de saumon sont
légèrement différents. Quant à la quille, c'est à dire la partie en bois d'Iroko qui
forme la continuité entre le saumon en fonte et la coque , elle est tenue par un seul
boulon (au lieu de 5 sur le plan) . Ce boulon unique (N°8) est celui qui débouche entre
les couples 5 et 6 sur le plan .
- Le safran est sorti après avoir retiré son
étrier de maintien situé à mi-quille, on peut très bien le sortir par en dessous en
dégageant son pivot du bénitier (ou crapaudine) et en le tirant par en bas, le Requin
doit être alors levé de 1,5 mètres environ . La mèche de safran reste solidaire du
safran, avec cette méthode le travail est moindre .
- Bateau vide de tout plancher, les écrous sont
découpés à la meuleuse électrique . La cale en bois est enlevée et la tige filetée
d'extrémité du boulon est dégagée sur 8 à 10 cm. Ceci permet de bien voir la sortie
de boulon qu'il faut frapper. Si le premier boulon de l'avant (N°1) qui mesure moins de
20 cm est chassé facilement au marteau il n'en n'est pas de même des 7 autres qui ne
sortiront qu'à la masse de bûcheron .Le point dur est le dessertissage de la tête du
boulon enfoncée et soudée par le temps dans la fonte . Il ne faut pas avoir peur de
frapper fort , le bois ne force pas, en fait la percussion est transmise à la tête du
boulon logée dans le saumon . Il faut faire apparaître les 5 premiers millimètres sous
le saumon pour être certain d'avoir gagné . Un seul boulon situé au milieu de la cabine
n'a pas voulu sortir selon ce procédé, on a alors soulevé la coque avec les sangles,
laissant ce boulon solidaire du saumon . Il sera sorti plus tard . En fait grâce à une
bonne masse et une tige en fer (D=18 mm, L=1000mm) pour chasser les boulons, il n'a pas
été nécessaire de chauffer les têtes.
L'atelier est parfaitement adapté : croc
d'élingage avec palan à chaîne qui permet de soulever le requin de son berceau et
sortir par en dessous les boulons les plus longs.
Des sangles ont été confectionnées en prévision
de ces manutentions . Les points centraux d'élingages ont en effet disparu avec le
meulage des écrous .
Le saumon se décolle et reste posé sur le berceau,
la quille bien que, apparemment plus tenue par rien, reste accrochée à la coque ; en
fait je découvre un très gros clou qui avait servi à la construction . La quille en
Iroko pèse de l'ordre de 4O à 50 Kg elle est constituée de 7 parties assemblées qui se
dessinent en fendant la peinture lors de l'extraction des boulons .
OLBIA II est désormais en trois
morceaux ,quille , saumon, coque . Le berceau roulant accueille le saumon qui a une
fâcheuse tendance à cabaner et est rapidement calé ; quant à la coque elle repose sur
un deuxième berceau .
La quille en bois est manoeuvrable à deux
personnes. elle est déposée sans séparation des sept parties qui la composent . Deux
éclats devront cependant être repris par le charpentier car, n'ayant imaginé un tel
poids, elle est tombée lors de son désaccouplage de la coque et s'est légèrement
abîmée .
la semelle de quille découvre complètement la
jointure avec le premier bordé de gal bord et comme je le pressentais le raccord est
disjoint de 2 à 3 mm sur une longueur de quatre mètres de part et d'autre au droit du
mât .
Une quantité d'eau de 50 à 80 litres par heure
rentrait par cette jointure lorsque le bateau était au mouillage forain .
- LA CONFECTION DES BOULONS EN INOX .
Les anciens boulons sont conservés soigneusement
pour pouvoir servir d'exemple à la confection des nouveaux . La forme de leur tête est
soit tronconique soit cylindrique, elle épouse parfaitement l'orifice du saumon. Les
plans annoncent des diamètres variables de 16 à 22 mm, mais les boulons sortis sont tous
de diamètre de 20 mm (excepté le N°8 de tenue de quille qui est du 18 mm) et cela
simplifie le travail.
A l'occasion d'un passage à Paris , je passe chez
FIRSTINOX (RER station Le Bourget) 5 à 13 rue de Verdun 93120 LA COURNEUVE tel 48 38 08
80 et j'achète tout ce qu'il faut pour l'usinage des nouveaux boulons et des ferrures
intérieures d'élingage . Recommandé par la revue "Bateaux", cette maison
d'inox en gros accepte de vendre aux particuliers à des prix défiant toute concurrence
(visserie compris) . Pour un peu plus de 1000 F , je possède maintenant la matière
première d'excellente qualité pour fabriquer les nouveaux boulons .
De retour à BREST en T.G.V. avec mes tiges d'inox,
la soudure, les plaques de 10mm pour les ferrures, soit plus de 50 kg de matériel, je
bénis pour une fois la SNCF et ses chariots à bagages .
J'ai pris également les écrous de 20 mm chez
Firstinox car, méfiance avec les pas de vis lors de l'usinage, et rien de mieux que de
donner l'écrou appairé avec la tige à fileter pour éviter toute mauvaise surprise de
pas mâle/femelle incompatibles.
Je choisis la maison de mécanique générale
TIMOBREIZ (13 rue du Colonel Berthaud 29200 BREST tel 98 44 89 28) pour réaliser à
l'identique en inox le matériel . Bien m'en a pris car le travail d'usinage est parfait,
cette maison a l'habitude de travailler en sous-traitance de la marine sur les chantiers
de sous-marins . Le prix de l'usinage complet est revenu à 1660 T.T.C. .
- LA REMISE EN PLACE ou
"REQUILLAGE"
Après avoir :
- repris à la ponceuse à bande la semelle et les
contreparties de la quille,
- remis quelques dizaines de vis pour consolider la
tenue du premier bordé de gal bord sur les varangues et la semelle de quille,
- enfoncé une cordelette de coton de part et
d'autre de la semelle de quille dans la jointure qui baillait et sur toute la longueur du
bordé de gal bord .
- comblé au sicaflex, la jointure au dessus de la
cordelette de coton et les têtes de vis nouvelles
- fait sabler et chouper le saumon,.
la coque est présentée juste au dessus du saumon
et de la quille, qui sont équipés alors de seulement deux boulons de quille les N°4 et
7.
Ces deux boulons sont ceux qui saisissent les
manilles d'élingage et une fois à poste permettront de soulever OLBIA
au moyen des élingues intérieures et sans les sangles extérieures .
Le raccord entre la fonte et le bois est largement
badigeonné au blanc de zinc, produit directement commandé à Nantes par le charpentier
de marine . Il est strictement identique au produit d'origine .
Tout se passe exactement comme prévu , les 2
boulons inox rentrent et les deux premiers écrous sont mis à poste avec les plaques
supports d'élingage ; le bateau est soulevé après un petit ajustage de quille .
Celle-ci se mettait très légèrement de travers et un coup de vérin l'a replacée dans
l'axe sans difficulté.
Le bateau élingué à 1,2 mètres au dessus du sol,
les autres boulons sont mis à poste en tapant la tête pour qu'elle rentre à force dans
sa cavité, bien dans l'axe et à fond . L'usinage des boulons se révèle parfait, pas un
coup de meule à donner .
Le charpentier refait les 8 cales intérieures qui
servent à reprendre l'angle de sortie de fausse quille de chacun des boulons mais
également à compenser les petites erreurs de mesure de longueur des boulons .Du suif
chaud donc liquide est coulé sur le tour du boulon pour ne laisser aucun vide . Le Requin
retrouve sa quille en moins d'une journée. Les rondelles des écrous sont remplacées par
des plaques inox au dessus de chaque cale pour éviter la rentrée de l'ensemble écrou
rondelle dans la cale en bois et mieux répartir l'effort sur l'ensemble cale/chapeau de
quille .
Avec quelle force faut-il serrer les écrous ?
j'opte pour un serrage moyen .
Ce travail a été réalisé en deux fois une
journée à trois personnes . Le sablage de la fonte n'apporte en fait aucune plus value
car le saumon est récupéré avec de très nombreux creux et bosses qui demanderont des
heures de travail, un simple coup de ponceuse sur sa tranche supérieure aurait suffi .
Pour le reste je referais la même chose ;
l'élément déterminant est la qualité de l'emplacement de travail avec des berceaux
pratiques, palan, espace, électricité enfin tout ce qui permet d'aller vite et bien .
J'allais oublier une information utile, les boulons
retirés avaient perdu au pire 6 à 7 mm de diamètre soit environ 30%, le maximum
d'oxydation constaté est au niveau de la jointure quille/saumon . Ces boulons avaient 34
ans et auraient pu en faire encore au moins 20 mais la plaque d'élingage avant, prise
dans le boulon n° 4 était prête à lâcher dans les 3 ou 4 ans à venir.
Enfin en cas de doute sur la qualité des boulons de
quille je préconise un remplacement unique du N°4 ou 5 qui donnera une bonne idée de
l'état des autres et permettra d'envisager l'avenir avec sérénité .
En remplacer un chaque année? pourquoi pas .
Changer du fer qui rouille par de l'inox, qui brille
et ne vieillit pas, est un gage de longévité et de préservation de votre Requin .